Les acteurs: Antommarchi.


Antommarchi face à Napoléon malade.


Octave Aubry: Sainte-Hélène vol II - p.179



Le 10 octobre (1820), au sortir d’un bain trop chaud et trop prolongé, Napoléon s’évanouit. On le porta dans son lit. Il souffrait de façon presque continue de maux de tête, et sentait au côté droit comme le glissement tranchant d’une lame. Il appelait cette douleur son « coup de canif. » La constipation était opiniâtre et il devait user chaque jour de lavements, qui l’affaiblissaient encore. Antommarchi conseilla l’application de vésicatoires aux deux bras. Napoléon refusa :

- Pensez-vous que M. Lowe ne me martyrise pas assez ?

Bertrand et Montholon insistent et il finit par céder.
Mais Antommarchi ne sait pas poser les vésicatoires. L’Empereur gêné fait chercher en vain le docteur qui s’amuse à Jamestown. Quand il rentre, il vient demander l’effet du remède :

- Je ne sais pas, répond Napoléon. Laissez-moi tranquille… Vous me posez des vésicatoires qui n’ont pas de formes, vous ne rasez pas la place avant de les appliquer ; on ne le ferait pas pour un malheureux dans un hôpital. Il me semble que vous auriez bien pu me laisser un bras de libre sans les entreprendre tous les deux. Ce n’est pas ainsi qu’on arrange un pauvre homme.

Et comme Antommarchi veut répondre :

- Allons, vous êtes un ignorant, et moi un plus grand encore de m’être laissé faire.



Sa vie.


Au dictionnaire:


   

Encyclopédie sciences médicales 

Dictionnaire 





Le testament de l'Empereur.


Montholon, exécuteur testamentaire:


 

Au moniteur du sa 20/12/34 





Antommarchi, médecin


Explication via le Moniteur.


 

Serres contre Antommarchi 





La mort d'Antommarchi.


Annonce au Moniteur:


 

Ma 19/06/38 




Antommarchi, par le docteur A. de Mets, dans "la vraie figure du dr Antommarchi" (Extraits) - éd 1938


Parcours avant Sainte-Hélène.



Le Docteur Antommarchi qui soigna l’Empereur du 9 septembre 1819 jusqu’à sa mort, le 5 mai 1821.

« Les Derniers moments de Napoléon », rédigés au jour le jour, a été publié deux ans après la mort de Napoléon.


Antommarchi était un compatriote, un Corse de vieille souche. Né à Morsiglia en 1789, il avait été l’élève de Mascagni à Florence. Mascagni était à ce moment une célébrité européenne, un des plus fins anatomistes et cliniciens de l’Italie. Mascagni appréciait beaucoup le caractère studieux et l’habileté de son jeune disciple ; il se l’attacha comme prosecteur à l’hôpital Santa Maria Nuova à Florence. Il demeura pendant six ans à son service donnant des preuves de savoir et de sens médical. C’est un beau stage.

Entre-temps, Antommarchi avait pris le bonnet doctoral à Pise ( 1808) ; quatre ans plus tard il présenta sa thèse de chirurgie devant la même académie.

Recommandé par Mascagni, Antommarchi fut agréé par Madame Mère. II fut convoqué devant un cénacle de professeurs de l’Université de Rome, appelés à discuter le rapport que O’Meara avait envoyé à Madame Mère et à donner leur avis sur le cas de l’Empereur.


Barbier ou chirurgien ?



En France, jusqu’au milieu du 18e siècle, la chirurgie était exercée par les barbiers.
Boudet, au temps de Louis XIII, se qualifiait « premier barbier et chirurgien du Roi ».

Au milieu du 17e siècle, sous Riolan, une séparation radicale s’était faite entre les barbiers et les chirurgiens. Dès la fin du 17e siècle, Louis XIV avait nommé à l’usage de ces derniers des démonstrateurs d’anatomie au Jardin du Roy, qui y enseignaient, non plus en latin comme à la faculté, mais en bon français. De nombreux étrangers fréquentaient ces leçons.

Bien plus, l’Académie des sciences y fut créée dans les dernières années du 17e siècle et les chirurgiens y étaient admis. Louis XV, en 1731, créa l’Académie de chirurgie, ce qui fit jeter des cris de paon aux docteurs régents de la Faculté.

Il est entendu que le titre de barbier du Roi persiste comme tant d’autres titres à la cour : comme le chambellan, l’écuyer, le tapissier, le grand veneur, l’écuyer tranchant ; ce sont des souvenirs de choses qui ont évolué.

Les termes de barbier et de chirurgien-barbier ont conservé un sens péjoratif, et c’est un tort de les appliquer dans ce sens à Antommarchi.


En France ( et en Italie ), la chirurgie, au début du 18e siècle, est aux avant-postes de la science. Elle se sert, comme disait déjà A. Paré, du langage du vulgaire ; elle a abandonné le latin. C’est l’une des causes de son évolution rapide. Elle ne fait plus de la scolastique, mais de l’observation. Elle a résolument abandonné à la médecine les vieux systèmes dont les derniers sont tombés sous les coups de Pasteur.


Opinions sur Antommarchi.



Dr Keith :

Antommarchi appartient à un genre bizarre d’hommes, produit de nos laboratoires de recherches et pleins d’enthousiasme pour la science. En dehors de leurs laboratoires, ces hommes équilibrés dans leurs jugements et dans leurs actes lorsqu’on les mesure par le Standard ordinaire de la vie commune.
A l’intérieur du laboratoire, ils sont chez eux, leurs yeux sont ouverts, ils voient clair, leurs cerveaux cherchent des énigmes là où le simple mortel ne voit rien. »


Lord Rosebury reconnaît à Antommarchi un seul mérite, d’être un bon prosecteur, et un seul service ( et ce service efface tous les mensonges de son livre): « Il a pris le moulage de la figure de Napoléon après sa mort».


F. Masson écrit :

« Ce terrible homme, affolé de vanité, d’ambition et de lucre, familier, audacieux, toujours hors de propos, se croyait égal à tous sinon supérieur, avec une étonnante idée de soi que complétèrent une ignorance tranquille et un imperturbable aplomb ».
« II eût fallu un médecin français ayant acquis une compétence, fait des études, subi des examens, suivi l’hôpital, ayant appartenu à sa maison, connaissant son tempérament, capable de suivre, de décrire une maladie, peut-être d’y porter remède. Il fut livré à une espèce d’anatomiste florentin qui n’avait jamais exercé la médecine et qu’on disait avoir été envoyé exprès pour l’autopsie ».

Lenôtre:

« Si quelqu’un n’était pas destiné à la gloire, c’était bien ce petit frater qui en 1818 était préparateur de dissections à l’amphithéâtre de Florence. Il s’appelait François Antommarchi – il avait 29 ans – né en Corse, il était resté jusqu’à l’âge de quinze ans sans maîtres : à peine parlait-il français. Venu à Florence pour y étudier l’anatomie, il ne semble pas qu’il obtint le diplôme de docteur ; bien que plus tard il se parât de ce titre, il reste un simple amateur et il n’avait guère exercé quand à la fin de l’année 1818 le Cardinal Fesch (l’oncle de Napoléon) le désigna pour être le médecin de Napoléon à Sainte-Hélène ».


Octave Aubry: (« L’autopsie de Napoléon par Antommarchi ».)

« Tous les assistants suivent avec la plus grande attention les gestes d’Antommarchi qui disséquait habilement. Les médecins anglais discutent autour de cette autopsie brutale, où les opinions s’affrontent devant un cadavre béant et un carabin pérore en découpant comme à l’étal, les viscères de Napoléon ».


Note biographique :



Francesco Antommarchi est né à Morsiglia (Cap Corse), le 5 juillet 1789. Son père était notaire à Morsiglia appartenait à une très ancienne souche alliée aux meilleures familles du pays.

F. Antommarchi fit ses études à Livourne, puis à Pise et les succès remarquables qu’il obtint appelèrent plus tard sur lui l’attention du Chevalier Colonna di Leca, intendant de Madame Mère.
En 1803, il passa sa thèse de Philosophie et en Médecine à l’Université de Pise le 13 mars.
Deux mois après la réception du jeune docteur, le décret impérial du 12 mai 1808 bouleversait la Toscane.

Napoléon, après avoir chassé la reine d’Etrurie, décida d’annexer à l’Empire les populations florentines. L’exercice de la médecine nécessitait désormais un titre scientifique français. Sans s’attarder à obtenir l’équivalence de son diplôme, Francesco se remet à l’étude; il s’inscrit à Florence à l’école de maîtres éminents du Collège de Chirurgie.

Le 9 juillet 1808 ; il est admis à l’Hôpital de Santa Maria Nuova avec la caution du docteur Nicodemo Bettaga. Il devait fournir pour sa nourriture et son entretien 4 écus par mois. Ainsi il est admis parmi les « convittori » de l’hôpital. II est dès lors astreint aux obligations des nouveaux : aux gardes, à l’assistance à tous les cours et aux leçons de l’hôpital. Sans compter les grands cours complets d’anatomie qui durent pendant toutes les études, il suit les cours complets de psychologie, de thérapeutique, de pathologie chirurgicale, d’obstétrique, de chimie médicale, de botanique, de médecine opératoire, formant un cycle complet de 4 ans.
Il passe par une filière longue et difficile pour devenir sous-caporal. Caporal et enfin « giovane de medicheria ». Non seulement il n’a plus rien à débourser, il est honoré pour ses nouvelles fonctions. Elève favori du professeur Mascagni, une illustration de l’Anatomie italienne qui brillait alors au premier plan, il présente en juin 1812 sa thèse de doctorat en chirurgie.

Une fois la thèse de chirurgie passée, ce qui lui faisait 2 doctorats à 4 ans de distance, Antommarchi entre au service du Prof. Mascagni qui est séduit par son extrême habileté et son zèle. La place de prosecteur étant devenue vacante par le départ du titulaire Ucelli, Antommarchi est désigné pour le remplacer, malgré les hautes influences dont dispose un concurrent.


De tout ceci résulte qu’Antommarchi fut quelque chose de plus qu’un petit frater corse – qu’il fut deux fois Proclamées en 4 ans docteur en médecine et en chirurgie – et qu’il eut une longue préparation hospitalière, plus de huit ans, un record à cette époque.


Après la mort de l’Empereur, Antommarchi est à Paris, rue de Rivoli et pratique la médecine. Il entretient des relations d’amitié avec les anciens de Sainte-Hélène. Le maréchal Bertrand lui veut du bien et le reçoit en son château de Châteauroux.

Tout le monde se tient coi. La terreur blanche règne. Il n’est pas question du masque de Napoléon.

Après la révolution de juillet, la situation est détendue. Le comité que le maréchal Bertrand préside et où figurent de nombreux Bonapartistes, lance l’édition du masque de bronze de Napoléon. Antommarchi le signe. C’était son droit.

On n’a pas attendu la mort du Dr Burton mais la fin du régime de la restauration. Cela et le retour des cendres, la translation au Dôme des Invalides signifient l’évolution des esprits.


Il s’embarque pour l’Amérique en 1834 et visite la Nouvelle Orléans, Mexico, La Havane. Il est partout bien accueilli.

Il se reprend à faire de l’oculistique. Ses opérations de cataracte ont beaucoup de succès.

Il va visiter les colons français venus de Saint-Domingue et établis planteurs de café aux alentours. Finalement il se fixe à Santiago (Cuba) en mars 1834.

Ses succès d’oculistique furent très remarqués. Aussi était-il tenu en grande estime et respecté de toute la population.

La fièvre jaune épidémique dans l’île était en violente recrudescence au début de 1838. En mars, Antommarchi fut attaqué à son tour et enlevé en quelques jours.

Sa mort fut un deuil national.

Le Général de Moya et le marquis Tenyne conduisaient le deuil. Les régiments de la garnison rendirent les honneurs aux restes mortels d’un des derniers serviteurs de l’Empereur des Français.

Le marquis de Tempu, auquel il avait rendu la vue, ainsi qu’à sa mère, voulut que son médecin fut inhumé dans la crypte de sa famille.

Bref, ce fut une apothéose pour Antommarchi.



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