Chronologie: l'île d'Elbe.


L'homme Napoléon.



NAPOLÉON, Empereur de l'île d'Elbe - souvenirs & anecdotes de Pons de l'Hérault -présenté et annoté par Christophe Bourachot, Les Éditeurs Libres



Portrait de Napoléon

…« Aux jours de sa toute-puissance, alors qu’il était le Roi des rois, nul n’était assez haut placé pour pouvoir regarder l’empereur Napoléon en face ; il échappait à toutes les observations. Les louanges avaient cessé d’avoir un caractère de vérité.
Il n’en était pas ainsi à l’île d’Elbe. Le prince qui était venu régner sur ce rocher ne portait point l’auréole d’invulnérabilité qui naguère couronnait l’empereur des Français…Cependant Napoléon n’était pas moins grand à Porto-Ferrajo qu’à Paris. Mais le prestige avait cessé : on doutait de l’immensité de son génie, ou du moins on faisait semblant d’en douter. Ce doute flattait les nains de droit divin qui, dans les illusions de leur orgueil, s’imaginaient pouvoir ainsi se rapprocher du géant populaire, à la taille duquel ils n’avaient jamais eu jusqu’alors la pensée de mesurer leur taille.
…Il n’y a donc rien d’extraordinaire dans la croyance que l’empereur Napoléon n’a jamais été plus complètement et plus parfaitement examiné qu’à l’île d’Elbe. Ce n’est qu’à l’île d’Elbe en effet que l’on a pu étudier et connaître Napoléon. Soldat, il devait prendre et il prenait toutes les formes que son ambition lui imposait ; empereur, il était placé si haut qu’on ne pouvait pas le voir ; à Sainte-Hélène, il posait pour la postérité. Mais à l’île d’Elbe il n’en était pas de même : ce n’était plus Napoléon l’invincible, Napoléon le Roi des rois, Napoléon inabordable ; c’était Napoléon vaincu, Napoléon dépossédé, Napoléon populaire. Ce n’était pas Napoléon prisonnier et torturé comme il fut ensuite à Sainte-Hélène. Il n’avait pas cessé de régner.
Nous n’avons jamais vu un portrait de Napoléon parfaitement ressemblant. Eh bien, on n’avait pas été mieux inspiré dans la peinture de son caractère moral que dans celle de ses traits physiques. »

Merci à Diana


Réactions de Napoléon face aux autres personnes qui lui parlent:

La promenade à pied sur la grande route qui entourait le golfe de Porto-Ferrajo était, pour l’ordinaire, le rendez-vous des étrangers qui n’étaient pas présentés à l’Empereur, des Elbois qui voulaient le voir, et de toutes les personnes qui avaient besoin de l’entretenir. L’Empereur s’arrêtait facilement, causait volontiers, et ce n’était que dans ses moments d’inquiétude qu’il ne se prêtait pas aux désirs des gens qui l’attendaient. L’Empereur n’aimait pas les individus qui, suivant son expression, « viennent de suite vous manger dans la main », et avec ces individus, il prenait un air de supériorité qui avait la puissance de tout intimider. Il se plaisait avec les personnes qui parlaient librement des choses qu’elles savaient, et il ne cherchait pas à les interrompre. Il avait des attentions marquées pour ne pas augmenter l’état pénible de ceux qui étaient troublés en lui adressant la parole. Il était extrêmement satisfait lorsqu’il était sûr d’avoir une supériorité marquée dans une conversation.
Pons de l'Hérault - p.140-141


L’Empereur expédiait vite les personnes pour lesquelles il n’était qu’un simple objet de curiosité, surtout lorsque ces personnes portaient un grand nom. Lorsque les visiteurs étaient pénétrés d’un grand intérêt pour les infortunes de l’Empereur, l’Empereur s’épanchait sans peine et prolongeait facilement la conversation ; lorsqu’il avait affaire à des hommes d’État d’une bonne réputation, il provoquait les discussions sur l’état du monde. Et alors il enthousiasmait ses auditeurs. J’ai vu des hommes d’État distingués, qui, vingt-quatre heures après l’avoir entendu, avaient encore une fièvre d’admiration. Les visiteurs appartenant au monde commercial ou industriel, l’Empereur se plaisait infiniment à les entretenir, et les engageait à le revoir, et il les traitait avec des égards marqués, surtout quand ils lui parlaient de la supériorité de la fabrique de Lyon, car Lyon était la cité de son coeur.
Pons de l'Hérault - p.160-161


Paul GRUYER - L'Empereur joue.


Quel n’était pas l’étonnement des touristes arrivant à l’île d’Elbe de voir ce petit homme courtaud et ventru, à profil de polichinelle italien, le nez barbouillé de tabac, en train de manger sur la grève, avec des pécheurs de thon, une bouillabaisse (cacciuco) cuite dans leur marmite et dont il paraissait se régaler. A San Martino, ils le découvraient tantôt très affairé à une partie de palets avec quelques bonnes dames de la bourgeoisie elboise, tantôt poursuivant ses poules échappées dans les vignes, ou se divertissant, dans une prairie, aux jeux innocents qu’étaient « corbillon qu’y met-on? », à la main chaude, au chevalier Cornard avec des cornets de papier pointus dans les oreilles, au baiser deviné, au colin-maillard. Enfin on l’avait vu au milieu de toute la Cour, ramasser au bord de la mer une poignée de petits poissons que les filets avaient laissés sur le sable, les insinuer avec habileté dans la poche de Bertrand et lui demander ensuite de lui prêter son mouchoir. L’Empereur se tordait de rire en voyant le Grand Maréchal du Palais retirer de sa poche ce menu fretin mouillé et gluant, tout frétillant, aux nageoires duquel il se piquait les doigts. Mais Napoléon donnait le change...

Merci au Général Bertrand


L'Empereur seul.


Le Sedia di Napoleone à Colle D'Orano sur la côte est.
Cet endroit est désigné comme le rocher où Napoléon aimait venir s'asseoir (Sedia) pour contempler sa Corse natale.

Merci au Général Bertrand



Merci à Roberto PETRONE de Rome





La garde impériale.



NAPOLÉON, Empereur de l'île d'Elbe - souvenirs & anecdotes de Pons de l'Hérault -présenté et annoté par Christophe Bourachot, Les Éditeurs Libres - novembre 2005 (p 181)



La garde impériale défilait chaque jour à la parade. C’était un grand spectacle que ce petit nombre de soldats échappés à tant de batailles, et qui, sillonnés de blessures, plus grands que la destinée, ne demandaient qu’à reprendre les armes ! Tout était remarquable dans ces hommes granitiques. Aussi, chaque jour, à midi, il y avait sur la place d’honneur beaucoup de monde pour les voir manœuvrer, et les voyageurs, surtout, ne manquaient jamais de s’y rendre.



Ci-dessous une carte postale montrant l'auberge "Ape Elbana" qui portait à l'époque le nom de "Bonroux". C'est là notamment que les grognards venaient "boire le coup" et passer leur ennui. Cette auberge se trouve à l'extrémité de la place d'Armes.
A droite de cette auberge, le Duomo (Eglise pompeusement appelée cathédrale) où fut reçu l'Empereur le 4 mai 1814 en fin d'après-midi et où l'évêque ARRIGHI chanta le Te Deum.
A côté, une vue plus récente de l'Ape Elbana.
Général Bertrand







Résidences impériales.



NAPOLÉON, Empereur de l'île d'Elbe - souvenirs & anecdotes de Pons de l'Hérault -présenté et annoté par Christophe Bourachot, Les Éditeurs Libres - novembre 2005 (p 398)



Les résidences impériales visitées par Valery:

Les deux anciens quartiers du génie et de l’artillerie réunis par un salon devinrent le palais impérial de Napoléon. Une allées d’acacias a été plantée par lui sur l’ancien rempart changé en jardin. Une citerne à pompe est aussi son ouvrage. On reconnaît dans la nouvelle et passagère habitation l’esprit et les habitudes d’ordre du maître, et tout le soin du matériel de la vie, sans sybarisme (sic) qui distinguait les résidences impériales, si habituellement réparées, dégagées et embellies sous son règne.

Une porte de derrière ménagée en cas d’invasion, montre les vicissitudes de cette fortune, si longtemps menaçante et réduite à craindre sous son propre toit. On remarque dans les appartements et particulièrement dans l’antichambre de la chambre à coucher, quelques gravures de la grande description de l’Egypte, souvenirs des temps de jeunesse, d’espérance et de gloire de l’hôte déchu. Dans le cabinet, le bureau d’acajou est resté à la même place ; il sert au gouverneur actuel de l’île, ancien officier de la Grande Armée, décoré de la Légion d’honneur qui ne se doutait guère lorsqu’il servait dans nos rangs, qu’un jour il dût signer des ordres sur le bureau de l’Empereur.

L’étroit asile de Napoléon ne fut pas toutefois sans dignité, sans grandeur : l’Empereur détruit était toujours contemplé avec une admiration curieuse ; d’illustres étrangers venaient le visiter, et pendant son règne de dix mois, les présentations anglaises seules s’élevèrent à près de mille. […]

À trois miles de Portoferraio, est Saint-Martin qui fut la villa de Napoléon. Portoferraio, la mer, les vaisseaux, les montagnes forment une très agréable vue. La maison petite, mais bien distribuée, n’a qu’un étage d’un côté, et deux de l’autre. La salle à manger est décorée à l’égyptienne ; sur la cheminée du salon, étaient restés les bustes en marbre de la princesse Elisa Bacciocchi et de son mari. La terrasse au-devant de la maison, a quelques orangers plantés par Napoléon ; il a réparé et presque créé une fontaine voisine d’excellente eau. Saint-Martin est aujourd’hui propriété de l’archiduchesse Marie-Louise, et son régisseur (fattore) y réside. Cette chétive villa est l’unique héritage laissé par le soldat puissant possesseur de tant de vastes et beaux domaines, et la fille des Césars est l’héritière du représentant de la plus vaste des révolutions populaires. Nulle part peut-être le prodige de l’élévation et de la chute de Napoléon n’est aussi frappant.
VALÉRY, op.cit

Merci à Diana



Transformation des Mulini en palais:

Il était du matin au soir au milieu des ouvriers. Le pavillon des Moulins n’ était plus reconnaissable. Les vieux moulins, les maisons d’embarras, tout ce qui pouvait gêner était démoli, et du sein de tant de décombres, il sortait, avec toute l’élégance possible, les deux maisons du génie et de l’artillerie, qui, réunies ou plutôt métamorphosées, formaient le palais impérial. Au fur et à mesure que l’on déblayait le terrain, la pioche et la bêche, d’un sol que tout le monde croyait improductif, faisaient un parterre magnifique. Le colonel Vincent me disait, un jour que nous visitions ensemble les travaux : « Si cela continue, il nous fera de l’Etoile une lune ou un soleil », et cette idée me fit bien rire. Le fort de l’Étoile domine le pavillon des Moulins.
(Pons de l'Hérault, p.151)


Voyez les illustrations sur cette page.



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